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Les risques de dérives sécuritaires

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Cigogne Drone Alsace

Nous avons reçu vendredi 20 novembre à 16h32 un email de la préfecture du Haut-Rhin accompagné d'un arrêté qui interdit les survols de rassemblements de personnes par drone.

Cet arrêté fait usage d'une terminologie trop imprécise qui prête à confusion, et laisse supposer d'autre part que tous les vols en scénario S3 sont potentiellement interdits pour une durée indéterminée.

Illustration : © Jean-Luc FORNIER

 

Arrêté d'interdiction de survol par drones de tous les marchés de Noël du Haut-Rhin

De : WEINLING Mathieu mathieu.weinling@haut-rhin.gouv.fr PREF68;
Cc : HERMENT Daniel daniel.herment@haut-rhin.gouv.fr PREF68;
Cc : DEBERDT Antoine antoine.deberdt@haut-rhin.gouv.fr PREF68;
Envoyé : vendredi 20 novembre 2015 16:31

Mesdames, Messieurs les opérateurs;
Vous trouverez ci-joint scannée, l'arrêté préfectoral de ce jour vous interdisant de procéder au survol, par les aéronefs télépilotés que vous exploitez, des rassemblements de personnes et notamment sur l'ensemble des marchés de Noël devant se tenir dans le département du Haut-Rhin dans les prochaines semaines.
Vous veillerez à la stricte observation de cette mesure.
D'avance merci
Bien cordialement
Direction de la réglementation et des libertés publiques

Un arrêté d'interdiction sans limite de durée qui en l'état pourrait compromettre l'avenir des opérateurs de drones professionnels

Cet arrêté est inquiétant à plus d'un titre et il ne se contente pas d'interdire le survol des marchés de Noël (interdits par définition), mais de tous les rassemblements de personnes (comprenez à proximité de) pour une durée indéterminée, avec toutes les conséquence que cela implique.

Nous avons donc répondu à Monsieur le Préfet du Haut-Rhin ainsi qu'aux 26 destinataires en copie de cet email par un texte que nous publions ci-après sous forme d'une lettre ouverte, qui appelle une réponse ainsi qu'une prise en compte des préoccupations des entreprises.

Lettre ouverte au Préfet du Haut-Rhin contre les interdictions des drones en scénario S3

Lettre ouverte adressée par email le 23 novembre 2015

Monsieur le Préfet,

Tout d'abord, nous tenons à préciser que ces propos n'engagent que nous et reflètent notre opinion, pas nécessairement celle de nos confrères en copie qui sont libres d'appuyer cette position ou de faire valoir des points de vue différents.

En dépit de l'état de crise qui altère les discernements et glace le sang de nos concitoyens, permettez nous de répondre à cette interdiction, a priori sans limitation claire de durée et qui telle qu'elle est rédigée, risque de sonner le glas des opérateurs locaux qui évoluent particulièrement dans le département du Haut-Rhin.

Il est mentionné dans l'arrêté une « interdiction de survol des rassemblements de personnes », or par nature, les survols de personnes sont interdits par la législation, des périmètres de sécurité devant-être mis en place pour éviter cela et cette seule dénomination porte à confusion. Les vols dans le cadre du scénario S3 à proximité (plus de 30 mètres selon l'arrêté du 11/04/2012, remplacé au 1er janvier 2016 par les arrêtés du 17 décembre 2015) de rassemblements de personnes représentent au moins 80% de l'activité des opérateurs de drones, considérant qu'il est nettement plus rare d'être missionné en rase campagne.

Il est impératif de préciser ce qui est interdit par cet arrêté et ce qui ne l'est pas, car en l'état, il laisse place à toutes les interprétations possibles et nous vous saurions gré si vous pouviez, dans un premier temps, lever les doutes et apporter rapidement des précisions par retour d'email aux personnes concernées.

Nous pouvons supposer que vous souhaitiez faire allusion à une interdiction de vol à proximité de manifestations organisées et coordonnées, mais l'absence de concertation et le manque de précision dans la terminologie employée entraînent un risque majeur pour notre profession, voici les explications.

Si toutefois cet arrêté devait s'appliquer dès lors que des personnes sont réunies (dans ce cas précisez combien), ce qui est la définition même du rassemblement de personnes, alors c'est le scénario S3 dans son ensemble qui serait impacté, les missions en zones peuplées étant par nature des rassemblements de personnes plus ou moins denses.

Il suffirait que les autres départements français prennent des décisions similaires à l'arrêté préfectoral du Haut-Rhin pour mettre définitivement à genoux une profession et une filière pleine d'avenir. Nous comprenons et partageons l'inquiétude générale mais c'est probablement les artisans de la terreur qui se féliciteraient de voir des entreprises françaises atteintes de manière durable et ce serait pour eux une nouvelle victoire.

Chacun doit garder à l'esprit que ce ne sont pas quelques opérateurs autorisés et identifiés qui demandent des autorisations spécifiques, et prêts de surcroît à se soumettre à toutes les exigences de contrôle et de sécurité, qui représentent une menace directe.

Si le pouvoir exécutif estimait que la bonne méthode consisterait, sans considération des conséquences économiques, à retirer de l'espace aérien tous les aéronefs télépilotés pour identifier plus facilement une éventuelle menace venue du ciel, alors la Préfecture du Haut-Rhin pourrait aussi par exemple interdire tous les véhicules à moteur dans les centres urbains car ces derniers ont dans l'histoire régulièrement été piégés à l'explosif.

Les aéronefs télépilotés n'ont à ce jour jamais engendré d'atteinte notable à l'ordre public et des interdictions excessives auraient pour conséquence d'allonger la liste des victimes cette fois-ci sur le plan économique. De telles mesures n'empêcheraient en aucun cas un usage malveillant des drones et nous pouvons douter que des gens mal intentionnés demanderaient le cas échéant une autorisation préfectorale ou se sentiraient concernés par cet arrêté d'interdiction, pas davantage qu'ils ne demandent une autorisation de port d'arme avant de commettre leurs méfaits.

Si une telle mesure devait se généraliser, les entrepreneurs concernés qui ne bénéficient pour la plupart d'aucune assurance chômage en dépit des charges sociales supportées, n'auraient probablement à terme plus d'autre choix que d'aller grossir rapidement les rangs des bénéficiaires des minimas sociaux, sort humiliant s'il en est pour des personnes qui hier mobilisaient sans compter leur énergie et leurs deniers personnels dans le développement de l'économie de notre pays, lequel cède progressivement à la panique. En outre, faute de constituer un moteur de développement, ils deviendraient en plus une charge pour la Nation.

La Préfecture du Haut-Rhin s'est déjà illustrée à plusieurs reprises dans le passé en stoppant la délivrance d'autorisations ou avec la mise en place de mesures controversées à l'égard des aéronefs télépilotés. Des mesures inadaptées et/ou des textes inapplicables provoquent l'effet inverse de celui escompté car ils pénalisent les entreprises, favorisent une prolifération des survols illégaux et ne règlent en rien les problèmes de sécurité.

Une réponse proportionnée et adaptée serait de ne pas mettre de frein à la délivrance des autorisations S3, mais d'exiger en contrepartie que tous les vols soient déclarés en préfecture via une adresse email dédiée (ou base de données relationnelle) 48 heures à l'avance (pas davantage, pour des raisons météo), avec dépôt d'un plan de vol. Cette méthodologie permettrait de communiquer l'information à l'ensemble des services concernés (les vols seraient donc connus de tous) qui pourraient le cas échéant prévoir d'accompagner l'opérateur sur le terrain et/ou d'effectuer les contrôles jugés nécessaires.

C'est d'ailleurs cette démarche qui devrait-être privilégiée à l'échelle nationale en lieu et place d'autorisations annuelles qui ne servent strictement à rien car elles ne permettent pas de savoir en temps réel qui fait quoi, ni où ni comment.

Les conditions expresses pour qu'un tel système fonctionne seraient :

  • La mise en place d'une liste publique et maintenue à jour de tous les contacts dédiés pour chaque département ;
  • L'harmonisation des procédures préfectorales pour que cessent les interprétations personnelles et les demandes abusives (autorisations redondantes de mairies, de propriétaires de terrains inconnus, etc, etc) qui nous empêchent littéralement de travailler car ingérables, alors que la DGAC a déjà traité nos dossiers d'autorisation S3 en amont ;
  • Le respect de délais de traitement courts (48 heures maximum) en adéquation avec la réalité économique pour permettre l'activité des opérateurs.

Avec un tel schéma, les opérateurs seraient dans l'obligation d'assurer la sécurité de leurs missions connues de tous, encouragés à la transparence car rassurés par le fait qu'ils pourront répondre rapidement aux demandes de leurs clients qui imposent le plus souvent des délais très courts. Ce sera le gage pour les services de l'Etat de pouvoir identifier immédiatement une menace tout en conciliant ces impératifs avec la nécessaire liberté d'entreprendre.

Nous ajouterons que les exploitants professionnels de drones civils ne sont pas les ennemis de la Nation et qu'ils sont souvent proches des milieux aéronautiques ou militaires. Il existe environ 2000 exploitants répartis sur tout le territoire, l'utilité des aéronefs télépilotés pour les pouvoirs publics n'est plus à démontrer et un tel maillage géographique serait probablement utile en certaines circonstances avec une rapidité de mise en oeuvre certaine.

Nous conclurons en précisant que si le législateur n'y prend pas garde, quelques individus nuisibles vont réussir à paralyser l'économie du pays en plus de le terroriser.

Monsieur le Préfet, sachez que nous ne doutons pas un seul instant de votre volonté de protéger les populations, mais votre décision n'aura probablement pas l'effet escompté et pénalisera en revanche nos entreprises. Même si l'objectif initial n'était pas d'interdire tous les survols, cet arrêté nous place dans une grande précarité. Ne voyez pas dans notre démarche une quelconque attaque ou volonté de créer une polémique, ce n'est pas le moment, nous voulons simplement prévenir la généralisation de mesures sans concertation et arbitraires à l'égard des exploitants de drones civils, qui doivent pouvoir continuer à verser des salaires et à nourrir leurs familles.

Article 5 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi.

Bien cordialement,

Signataires

Cette analyse et cette lettre ouverte ont été réalisées et co-signées par Olivier DENEUVIS (Aerofilms) et Jean Luc FORNIER (Aerocampro).

Toute autre personne/entreprise qui partage ces craintes et cette vision est la bienvenue, n'hésitez pas à vous rapprocher de nous ou de tout autre acteur impliqué dans cette démarche, selon vos affinités.

Cette lettre ouverte est publiée sous licence Creative Commons « Attribution - Partage dans les Mêmes Conditions 2.0 France (CC BY-SA 2.0 FR) » et nous vous invitons à vous manifester si vous estimez que nos activités sont en danger. Vous pouvez utiliser/distribuer/modifier/adapter le contenu de cette lettre ouverte, à condition de le redistribuer sous la même licence CC et d'en citer la source.

Avertissement

Il semblerait que nombre de professionnels ne mesurent ni la portée ni les conséquences de l'arrêté de la Préfecture du Haut-Rhin, qui utilise les termes « rassemblements de personnes », jamais définis précisément par la DGAC. En cas d'accident en scénario S3, même à bonne distance d'un rassemblement de personnes (au sens manifestation organisée et coordonnée), comment la justice interpréterait-elle ces termes pour lesquels personne n'est en mesure à ce jour de fixer une limite ?

En outre, la DGAC a employé dans la législation des terminologies tout aussi vagues et dangereuses pour les exploitants qui ne peuvent pas déterminer avec précision les limites d'exercice de leur profession. Ainsi, il n'a à ce jour encore jamais été précisé ce qu'est une « agglomération », ni quelle est la différence entre une « zone peuplée » et une « agglomération », ni à quelle distance de celles-ci on change de scénario avec un passage de S-1 à S-3 et encore moins ce que signifie précisément le terme « à proximité » dans un domaine qui ne souffre pas l'approximation.

Les exploitants de drone civil ne devraient pas prendre ces questions à la légère et certainement pas sous-estimer les conséquences possibles de tels arrêtés, d'autant plus si cette démarche s'étendait à d'autres départements avec un risque de généralisation.

Réaction de la Préfecture du Haut-Rhin le 24 novembre

MISE A JOUR DU 24 NOVEMBRE 2015

La Préfecture du Haut-Rhin vient d'adresser ce jour à tous les exploitants autorisés S3 dans le département un arrêté modificatif de l'arrêté préfectoral du 20 novembre 2015, pour recadrer la portée du texte qui avait soulevé de vives réactions des professionnels.

Il semblerait que les propositions portées par cette lettre ouverte aient été entendues rapidement et c'est une excellente nouvelle, notamment grâce à la mobilisation des opérateurs concernés qui ont fait valoir leur mécontentement par email ou sur les réseaux sociaux.

Nous ne pouvons que nous réjouir de cette information car le nouvel arrêté limite de fait l'interdiction aux seuls marchés de Noël, ce qui implique une limitation dans le temps (il n'y en a pas le reste de l'année). En outre, le nouvel arrêté précise les conditions d'exercice réglementaires du scénario S3, ce qui implique également que les professionnels sont autorisés à travailler normalement hors du cadre désormais précis de cette interdiction.

Toutefois, nous pouvons souligner que la terminologie utilisée n'est toujours pas la bonne car l'arrêté devrait faire état d'une "zone d'exclusion" et non d'un "survol des marchés de Noël", étant donné que les survols de public sont par définition interdits par l'arrêté du 11/04/2012. Certes, l'interdiction est désormais circonscrite mais ces imprécisions récurrentes dans les différents arrêtés qui réglementent nos activités mettent en danger les professionnels qui ne connaissent jamais parfaitement les limites de l'exercice légal de leur activité.

Il serait aisé d'extrapoler et de contourner cet arrêté qui interdit le survol des marchés de Noël (mais pas de voler à proximité) sans prendre la peine de fixer des limites claires. Ce serait bien évidemment une très mauvaise idée et dans la situation actuelle chacun devra respecter cette interdiction que nous avons désormais mieux comprise, mais nous souhaitions démontrer en quoi la prise d'arrêtés aussi imprécis est dangereuse aussi bien pour les professionnels que pour les Préfectures. Il convient d'être extrêmement précis et mesuré, l'approximation ne profite à personne.

Nous ajouterons également que nous pouvons nous interroger sur le bien fondé d'une interdiction de survol à proximité des marchés de Noël, qui pourraient tout à fait avoir lieu dans des conditions de sécurité optimale en prenant garde de le faire avec le maximum de précautions et les autorisations de tous (Mairie, organisateur, Préfecture, etc), cela dit l'essentiel est sauf et nous n'allons pas polémiquer.

Voici donc l'arrêté modificatif qui a le mérite de soulager tout le monde et d'avoir été promulgué avant une éventuelle généralisation à d'autres départements. Nous pouvons à ce titre remercier la Préfecture du Haut-Rhin d'avoir été raisonnable et d'avoir écouté nos doléances.

Olivier DENEUVIS (Aerofilms) et Jean Luc FORNIER (Aerocampro)

L'arrêté modificatif de d'interdiction sans limite de durée qui en l'état pourrait compromettre l'avenir des opérateurs de drones professionnels

Gestion des commentaires

Chacun est libre de commenter cet article, toutefois, nous appelons à la retenue et à la décence au regard des circonstances. L'objectif de cette lettre ouverte est d'une part d'alerter tout un chacun sur les conséquences possibles de la prise de tels arrêtés et d'autre part de faire des propositions alternatives pour concilier sécurité et impératifs économiques.

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